Relectures postcoloniales des échanges artistiques et culturels entre Europe et Maghreb – 18e-21e siècles

9 > 10 avril 2015

Deuxième session du colloque international Relectures postcoloniales des échanges artistiques et culturels entre Europe et Maghreb (Algérie, France, Italie, Maroc et Tunisie) – 18e-21e siècles , organisé par l’Académie de France à Rome – Villa Médicis ; le Centre F.G. Pariset de l’Université Bordeaux-Montaigne; l’École du Louvre, Paris ; avec le soutien de l’École française de Rome ; de l’Institut National d’Histoire de l’Art (Axe Mondialisation), Paris ; de l’Institut de Recherches sur le Maghreb Contemporain, Tunis ; et du Laboratoire d’Archéologie et d’Architecture Maghrébines de l’Université de la Manouba, Tunis. Ce colloque souhaite, en réunissant des spécialistes originaires des deux rives de la méditerranée et d’ailleurs, envisager comment se sont construites les relations culturelles et artistiques entre l’Algérie, la France, l’Italie, le Maroc et la Tunisie dans des moments cruciaux de leur histoire, avant la colonisation, en situation coloniale et après les indépendances. Ces relations se sont inscrites dans l’art, l’architecture, l’archéologie et les institutions culturelles et demandent à être revisitées à la lumière de la réflexion postcoloniale et d’une déconstruction systématique des regards et des savoirs, aujourd’hui bien engagée. Il s’agit donc d’abord de prendre en considération les relations présentes et la gestion d’un héritage commun, en refusant l’essentialisme inscrit dans la relation coloniale et en repensant les récits linéaires de la modernisation des « autres ». Le projet participe moins d’une accumulation de nouvelles connaissances que du décentrement de nos savoirs. La première session, qui s’est tenue en décembre 2014 à l’École du Louvre, à Paris, a permis de traiter de l’héritage colonial des musées, Cette  seconde session, intitulée Ancrage et déterritorialisation des artistes : réécrire l’histoire , est consacrée aux arts visuels sous l’angle à la fois historique et contemporain. Elle concerne les productions artistiques en contexte colonial et l’art contemporain en lien avec les pays concernés. L’enjeu est de revenir ici sur les notions d’héritages et d’essentialisme propres aux productions artistiques dites postcoloniales. Pour des raisons simplificatrices, communicationnelles ou économiques, les  œuvres et les images du passé, comme celles d’aujourd’hui, sont sans cesse envisagées dans leur relation avec les identités et la culture des communautés d’origine de leurs producteurs. Il est pourtant acquis  que l’identité coloniale ne peut être une mesure fixe, et qu’elle n’a pas cessé de se redessiner. Les  artistes en ont exprimé l’expérience selon des modes de créations artistiques très divers. Force est de constater avec le tournant anthropologique qui caractérise aujourd’hui le champ de l’art et qui inspire les études postcoloniales, que le fonctionnement et l’héritage de ces processus identitaires ont joué et continuent de jouer un rôle central dans le processus créatif et sa réception. Qu’il s’agisse de la tentative de créer des « écoles », au double sens de structures d’enseignement mais surtout de groupes d’artistes ancrés dans un territoire (école d’Alger, école de Tunis, artistes italiens de Tunisie…), ou au contraire d’une incessante déterritorialisation au gré d’exils et de migrations qui ont touché de nombreux individus pris dans l’étau de l’histoire et de ses vicissitudes, les artistes n’ont pu échapper à l’assignation de « l’origine » malgré la diversité de leurs modalités d’existence et de pratiques. Avec l’art contemporain, ce schéma a été réitéré au sein d’une grande scène artistique internationale : . les artistes de la diaspora ou issus de migrations se trouvent ramenés à un régionalisme « maghrébin », dont les œuvres seraient les indices culturels, ne faisant par principe pas l’objet d’une évaluation à l’aune de critères esthétiques. S’il convient de poursuivre la démarche démystificatrice proposée par Edward Saïd dans L’Orientalisme , en combinant analyse des valeurs esthétiques et lecture géopolitique,  il est nécessaire et opportun de soumettre aujourd’hui de faire un pas de plus. Déconstruire les représentations de l’autre ne signifie pas que l’autre « convoqué » existe. Le système de l’art quant à lui perpétue cette fiction. Pourquoi ? On est ici au cœur des représentations que la pensée postcoloniale et les artistes contemporains tentent « d’exposer ». Ces derniers sont souvent assignés à exprimer la note « originaire » attendue, en continuité avec des catégories identitaires sur lesquelles ils s’appuient pour effectuer un travail critique. Mais cet « essentialisme stratégique » montre aussi ses limites, que nous voulons ici éprouver et dépasser.

Programme du colloque

Première session L’héritage colonial des musées Paris, École du Louvre, 12-13 décembre 2014 Troisième session Transferts architecturaux, colonisation archéologique et invention des patrimoines Tunis, Musée national du Bardo, 4-5 juin 2015